dimanche 5 août 2012

Crise de la dette : quand les triples A du nord tomberont

L’Allemagne, première économie de la zone euro, pays modèle de compétitivité, aux finances publiques irréprochables ne sera pas épargné par une aggravation de la crise des dettes souveraines.
Lundi 23 juillet, l’agence de notation financière, Moody’s l’a confirmé en plaçant la note du pays aujourd’hui Aaa sous “perspective négative”. En d’autres termes, le pays n’est pas à l’abri de perdre d’ici douze à dix-huit mois ce 20/20, gage de sa solidité financière. Il en est de même des Pays-Bas et du Luxembourg, eux aussi “triple A”, indique Moody’s.
Enfin, l’agence indique qu’elle réexaminera “à la fin du troisième trimestre” le Aaa encore accordé à la France et à l’Autriche, deux autres pays de la zone euro déjà placés sous perspective négative en février. Seule la Finlande, petite économie ultra-vertueuses échappe à cette sanction et voit son triple A confirmé.
MONTÉE DE L’INCERTITUDE SUR L’AVENIR DE LA MONNAIE UNIQUE
En appui de sa décision, Moody’s explique que l’Allemagne comme les Pays-Bas et le Luxembourg, sont maintenant touchés par l’aggravation de la crise et la montée de l’incertitude quant à l’avenir de la monnaie unique.
Quitte à semer un peu plus le trouble dans l’esprit des investisseurs, l’agence américaine estime que la probabilité d’une sortie de la Grèce de l’Union monétaire s’est amplifiée au fil des mois. Et avec elle les effets de contagion menaçant d’autres pays, en particulier l’Italie et l’Espagne. Deux Etats surendettés qui font l’objet d’une défiance grandissante de la part des marchés.
L’Allemagne pourrait être contaminée par le biais de ses banques, jugées “vulnérables” du fait de leur ”exposition aux économies de la zone euro sous stress en particulier en Italie et en Espagne”, justement, note l’agence.
“UN MESSAGE ABSURDE, ET SCANDALEUX”
Et quand bien même le scénario catastrophe d’une sortie de la Grèce de la zone euro serait évité, ”l’hypothèse est de plus en plus forte qu’une aide collective soit nécessaire pour d’autres membres de la zone euro, comme l’Espagne et l’Italie”, indique Moody’s.
Surtout, le “fardeau” d’un éventuel sauvetage de ces pays est d’une “magnitude bien plus élevée ” que le soutien qui fut nécessaire à la Grèce, insiste l’agence. Au final une aide financière à ce, ou ces pays, pèsera donc sur les économies aujourd’hui bien notées.
“Un message absurde, et scandaleux”, commente Patrick Artus, chef économiste chez Natixis et professeur à l’école polytechnique. Moody’s souligne-t-il, insinue qu’une forme de mutualisation de la dette en zone euro fragiliserait les finances publiques de l’Allemagne au risque d’attiser l’aversion de l’opinion publique à se montrer solidaire envers ses partenaires plus mal en point. Or selon M. Artus il est faux d’imaginer que les comptes publics de Berlin seront affectés sévèrement et durablement par une telle aide.
ÉCONOMIE LARGE ET DIVERSIFIÉE
Moody’s reconnaît, de fait, que le pays bénéficie d’une économie large et diversifiée. L’Allemagne, rappelle l’agence, a “une tradition de politique macroéconomique stable” et les surplus générés par la balance de ses comptes courants lui permettent de résister.
Mais ce profil ne suffit pas à lever la menace d’une possible dégradation. Notamment si le pays devait voler au secours de ses banques, si un pays de la zone devait sortir de l’Union monétaire en semant la pagaille dans le système financier, ou si les coûts de financement du pays venaient à se détériorer.
Pour l’heure, l’Allemagne considéré comme le pays le plus sûr de la zone euro emprunte sur les marchés à des taux historiquement faibles. Et de l’avis des experts, il est peu probable que l’annonce de Moody’s change la donne, en tout cas à court terme. “L’Allemagne continuera d’exercer son rôle d’ancre de stabilité dans la zone euro”, voulait aussi croire le ministère allemand des finances, lundi soir.

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